Thysen, Maurice, De duinen der gefusilleerden. Hoe de nazi’s in het geheim tweehonderd slachtoffers begroeven in Hechtel (Berchem: EPO-Mamoet, 2021), 314 p.
Pierre Muller, Université Catholique de Louvain
De nos jours, l’étude de la Résistance en Belgique continue de passionner les mémorants et les chercheurs. En témoigne l’excellent ouvrage-guide intitulé : Papy était-il un héros ? 1, rédigé sous la direction de Fabrice Maerten. Sa publication, en 2020, a apporté non seulement un véritable ouvrage-référence sur l’histoire de la Résistance en Belgique, mais également un précieux guide méthodologique pour les chercheurs aussi bien professionnels qu’amateurs. Passionné d’histoire, Maurice Thysen a étudié les sciences pédagogiques et l’agogique sociale à la KU Leuven. À travers son ouvrage : De duinen der gefusilleerden. Hoe de nazi’s in het geheim tweehonderd slachtoffers begroeven in Hechtel, lui aussi entend apporter sa contribution à l’histoire de la Résistance en Belgique en mettant en valeur un lieu encore méconnu du grand public : le cimetière secret d’Hechtel.
Depuis plusieurs années, Maurice Thysen consacre une grande partie de son temps, avec d’autres personnes sensibilisées à l’histoire, à l’étude de ce site situé en bordure du camp militaire de Beverloo. Ces années de travail ont déjà mené à la rédaction de plusieurs articles et à la publication d’une brochure : Het Executieoord en de Duitse geheime begraafplaats in het Gemeentebos te Hechtel. Via la publication de l’ouvrage : De duinen der gefusilleerden, il entend dépasser le stade de l’étude locale et faire connaître le cimetière secret d’Hechtel à un public plus large. Il est vrai que cet endroit, encore méconnu, est un haut lieu de la Résistance belge et de sa répression par les Nazis.
En effet, c’est à Echtel que les Allemands enterrent, de 1942 à 1944, les corps de 201 résistants et agents du SOE, ainsi que deux pilotes de la Royal Air Force. Afin d’éviter que cette partie reculée du camp militaire de Beverloo ne devienne un lieu de pèlerinage pour les patriotes et les familles des victimes, l’Occupant tient le lieu secret. Seuls des poteaux surmontés de numéros marquent les tombes. Après la guerre, la plupart des corps sont identifiés, exhumés et rapatriés dans leur ville d’origine. D’autres sont transférés au cimetière militaire de Leopoldsburg et à l’Enclos des fusillés de la Citadelle de Liège. En 1950, un monument est érigé sur le site.
L’ouvrage de Maurice Thysen est constitué d’une multitude de chapitres, rendant la table des matières assez dense. Nous y distinguons trois sections principales. La première, assez succincte, évoque la création du site d’Hechtel par ordre d’Alexander Von Falkenhausen (pp.18-20), le gouverneur militaire allemand de la Belgique et du Nord de la France entre 1940 et 1944. La seconde est, quant à elle, constituée de différentes notices consacrées aux 203 résistants, agents, otages et militaires inhumés dans le cimetière secret d’Hechtel. L’auteur a fait le bon choix de les présenter dans l’ordre chronologique d’inhumation. Indéniablement, il s’agit du corps du travail proposé par Maurice Thysen qui mène ainsi, pour chaque patriote, une analyse quasi prosopographique en s’intéressant aux raisons de sa condamnation, à son rôle dans la Résistance et aux circonstances de son exécution (pp. 21-234). Enfin, la dernière partie comporte un très appréciable apparat critique dans lequel l’auteur explique, pour chaque notice, quelles sources ont été mobilisées. Nous retrouvons également quelques annexes intéressantes, notamment sur d’autres cimetières secrets créés par les Allemands en Belgique, dont celui de Jumet (pp. 235-307).
Signalons le soin particulier accordé par Maurice Thysen aux sources consultées pour rédiger ce livre. L’auteur n’a pas ménagé ses efforts en consultant non seulement des archives locales, mais également les fonds disponibles au CEGESOMA, aux Archives Générales du Royaume, ou encore aux archives militaires d’Evere. Si cette étude est appelée à devenir « la » publication de référence sur le site d’Hechtel et ne manquera pas d’intéresser les historiens, en particulier ceux versés dans l’histoire de la Résistance belge durant la Seconde Guerre mondiale, le choix de brosser le portrait de chaque victime ou groupe de victimes enterrées à Hechtel rend l’ouvrage volumineux (344 pages) et difficile à lire. De plus, le lecteur aura l’impression que la biographie des victimes met en arrière-plan l’histoire du site lui-même, qui mériterait d’être davantage mise en avant2. Ces défauts ne sont cependant pas rédhibitoires. Ils permettent même d’ouvrir de nouvelles pistes de recherches, en l’occurrence sur l’histoire de ces « cimetières secrets » créés par l’Occupant dans notre pays.