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Mantels, Ruben, Torens van boeken (Veurne: Hannibal, 2020), 384 p.

Virgile Royen

L’Université de Gand encourage depuis longtemps les recherches consacrées à son histoire. De la série « Uit het verleden van de RUG » à Uit de ivoren toren de Gita Deneckere, paru à l’occasion du bicentenaire de 20171, en passant par le site Internet UGentMemorie 2, l’institution n’a eu de cesse de cultiver les recherches sur son passé riche et mouvementé. Ruben Mantels vient d’apporter une nouvelle pierre à l’édifice. Après Maar wat een wespennest! Het rectoraat van August Vermeylen en de vernederlandsing van de Gentse Universiteit (2010)3 et Gent. Een geschiedenis van universiteit en stad (1817-1940) (2013)4, il revient avec un nouvel ouvrage, consacré cette fois à la bibliothèque de l’UGent, fruit de sept années de travail au sein de ce service.

Le moment est propice. Les travaux de rénovation de la célèbre « Boekentoren » touchent à leur fin, et la bibliothèque vient de recevoir un nouveau site Internet permettant une visite virtuelle du monument restauré (dont les textes sont, eux aussi, de la plume de Ruben Mantels)5. Le projet de recherche à l’origine du livre a été initié par Sylvia Van Peteghem, qui fut bibliothécaire en chef de l’UGent de 2000 à 2020, et a joué un rôle de premier plan dans la patrimonialisation et la restauration du chef-d’œuvre de l’architecte moderniste Henry Van de Velde. Le retour des visiteurs est imminent. Dans ce contexte, on aurait donc pu craindre un « koffietafelboek », comme on dit en Flandre. Il n’en est rien : le livre de Ruben Mantels est un travail riche et ambitieux, replaçant l’évolution de la bibliothèque universitaire dans le fil de l’histoire du livre et de l’information.

L’ouvrage, dépourvu d’introduction et de conclusion, s’étend sur neuf chapitres, chronologiques, développant l’histoire de la bibliothèque du Département de l’Escaut, fondée en 1797, et offerte par la Ville de Gand à son université en 1817, comme cadeau de naissance. À travers son histoire, c’est celle de la lente ouverture du livre au monde qui se déroule devant nous. Les collections privées des monastères des Pays-Bas autrichiens furent ainsi confisquées par les révolutionnaires et mises, pour la toute première fois, à la disposition des citoyens, dans le cadre de bibliothèques publiques. Pourtant, au 19e siècle, la bibliothèque de la jeune université restait presque une affaire privée : le bibliothécaire en chef régnait sur elle en maître, palliant l’absence ou le retard de catalogage par sa connaissance intime de « ses » collections, qu’il agrandissait régulièrement par l’achat de nouvelles pièces rares. Ces livres anciens étaient ensuite mis à disposition, non des étudiants, mais des beaux esprits de Gand, des riches rentiers amateurs d’histoire et de belles-lettres - au nombre desquels le maître des lieux pouvait souvent être compté.

Dès la fin de ce siècle, l’essor du modèle allemand d’université de recherche bouleversa cette conception. La littérature courante en sciences naturelles avait dépassé en volume le fonds patrimonial, et le public se composait désormais d’étudiants et de chercheurs. Le mandat du bibliothécaire en chef Willem De Vreese (1911-1919) incarne cette nouvelle étape dans l’ouverture à la société : il parvint à dresser un premier catalogue complet des collections des bibliothèques de la… « Vlaamsche Hoogeschool » activiste. Le catalogue affranchissait les collections de la personne du bibliothécaire, tout comme la néerlandisation, acquise définitivement en 1930, détachait l’institution des cénacles francophones locaux. La « Boekentoren »

En ce début de 21e siècle, la bibliothèque de l’UGent apparaît comme plus ouverte que jamais : non seulement l’université s’est-elle démocratisée et féminisée dans la seconde moitié du siècle passé, mais le rôle des bibliothèques a été complètement chamboulé par la dématérialisation de l’information, entamée par le microfilm dans les années soixantes et poursuivie ensuite par l’ordinateur. D’abord limitées aux catalogues et aux bibliographies, cette dématérialisation s’étend aujourd’hui aux articles, aux bases de données et même aux livres, progressivement mis à la disposition de chacun grâce aux progrès de la numérisation et de la politique d’« Open Access ». « Voor veel gebruikers is de bibliotheek een website geworden. »6

Cette évolution fut pourtant loin d’être d’un fleuve tranquille. Ruben Mantels dévoile ainsi les innombrables intrigues et luttes de pouvoir entre les bibliothécaires, ou entre la bibliothèque centrale de l’université et les « barons », ces professeurs qui entretenaient une « handbibliotheek » dans « leur » service et en défendaient jalousement l’autonomie. Toutefois, l’auteur ne se contente pas d’une simple histoire institutionnelle. Il décrit les échanges et les réseaux qui relièrent la bibliothèque de l’UGent aux autres bibliothèques universitaires de Belgique et du monde, et qui furent souvent à l’origine de réformes et d’innovations locales de grande importance. La profondeur de la recherche dans les sources est impressionnante, comme lorsque l’auteur détaille le profil social des lecteurs au 19e siècle ou passe minutieusement en revue les « utopies informatiques » qui circulaient de par le monde dans les années soixantes. Elle peut être aussi déconcertante, comme lorsqu’il parcourt le journal intime de Jules Michelet ou la correspondance de Karel van de Woestijne en quête de quelques mentions de la bibliothèque gantoise, ou consacre deux pages à une légendaire table de billard au sommet de la Boekentoren.

Enfin, le dernier chapitre du livre (2000 à 2020) suscite quelques questions. Cette époque correspond au mandat de Mme Sylvia Van Peteghem et est présentée comme une période faste, marquée par la restauration de la tour, la victoire finale contre les « barons » et le « deal » avec Google pour la numérisation gratuite de livres gantois. Basé en partie sur des interviews des bibliothécaires, ces dernières pages pourraient sembler influencées par le contexte d’écriture de Ruben Mantels, comme, par exemple, lorsqu’il confie que Mme Van Peteghem distribuait du chocolat à ses collaborateurs pour motiver son équipe7, ou lorsqu’il écrit « Men is waarschijnlijk vriendelijker in de universiteitsbibliotheek dan aan de kassa van uw buurtwinkel. »8. On ne peut alors s’empêcher de repenser aux interrogations de Peter Dhondt à l’égard de l’histoire jubilaire des universités9.

Néanmoins, ces interrogations n’enlèvent que peu aux éminentes qualités de cet ouvrage, aux recherches colossales qu’il a exigé dans les sources et la littérature, et à son exposé clair et passionnant d’une problématique pourtant complexe.

- Virgile Royen

Références

  1. Deneckere, Gita, Uit de ivoren toren: 200 jaar Universiteit Gent (Gand, Tijdsbeeld, 2017).
  2. UGent Memorie
  3. Mantels, Ruben & Vandevoorde, Hans, Maar wat een wespennest! Het rectoraat van August Vermeylen en de vernederlandsing van de Gentse Universiteit (Gent: Gent Academia Press, 2010).
  4. Mantels, Ruben, Gent. Een geschiedenis van universiteit en stad (1817-1940) (Bruxelles, Mercatorfonds, 2013).
  5. Boekentoren.gent
  6. Mantels, Ruben, Torens van boeken (Furnes, Hannibal, 2020).
  7. Idem, p. 353.
  8. Idem, p. 342.
  9. Dhondt, Pieter, “Belgische universiteitsgeschiedenis vanuit een internationaal perspectief” in Contemporanea, 39:3 (2017), https://contemporanea.be/fr/node/233.