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Bruijns, Ruud, Liever revolutie dan oorlog, De Internationale Socialistische Anti-oorlogsliga (1931-1939), (Antwerpen: Vrijdag, 2018), 333 p.

Anne Morelli, Université Libre de Bruxelles

Celles et ceux qui s’intéressent à l’histoire de la gauche dans l’entre-deux-guerres connaissent ces photos qui nous montrent des défilés massifs de jeunes en uniforme, avec drapeaux et clairons, le poing levé, qui forment le « décor » habituel pour l’époque, des Premier Mai ou la protection des manifestations de gauche. Ils se présentent comme les adversaires inébranlables des jeunesses d’extrême-droite. Leur symbolique est claire : ils sont en uniforme pour se reconnaître et faire bloc, leur chemise est bleue comme le bleu de travail mais ornée d’une cravate rouge qui ne permet aucune équivoque sur leur appartenance politique. Ils marchent au pas car ils se veulent soldats de la paix. Ils brandissent des fusils brisés, pratiquent les marches aux flambeaux et leurs calicots, dénonçant à la fois les guerres et le capitalisme, se distinguent par trois flèches dirigées vers le bas.

Caractéristique de la forte politisation des jeunes de gauche de l’entre-deux-guerres, cette symbolique peut être celle de la Jeune Garde Socialiste (devenue Jeune Garde Socialiste Unifiée lorsqu’elle se lie aux Jeunesses Communistes) ou de l’USAF (Union Socialiste Antifasciste – surtout bruxelloise) mais aussi de la « Ligue Internationale Socialiste Anti-Guerre » (LISAG) dont il est question dans l’ouvrage de Ruud Bruijns. Le titre de l’ouvrage est repris d’une manifestation du fusil brisé de 1933 dont les manifestants brandissaient des calicots « Nous sommes les soldats de la Révolution sociale » et « Plutôt la Révolution que la guerre ». Pour des francophones, aujourd’hui, le mot « ligue » évoque plutôt les ligues françaises de l’extrême-droite nationaliste mais dans l’entre-deux-guerres le terme était utilisé sur tout l’échiquier politique.

La LISAG est née aux Pays-Bas et à Anvers dans un milieu de jeunes socialistes radicalement antimilitaristes et va essaimer avec succès à Bruxelles et en Wallonie.
Cette « ligue », qui jouit d’appuis syndicaux, est née formellement hors du POB mais recrute sur le terrain de la gauche de la social-démocratie. Les socialistes étant en Belgique à plusieurs reprises au pouvoir pendant cette période, le radicalisme de la LISAG va rapidement leur créer problème. À l’instar des anciens combattants socialistes, elle fait pression sur le POB pour qu’il adopte une attitude clairement pacifiste. Mais le parti social-démocrate ne peut mécontenter ses alliés au gouvernement sur des questions telles que la réduction du service militaire (que la LISAG estime une préparation au crime qu’est la guerre) ou la reconnaissance de l’objection de conscience. Le POB développe donc un double discours, à la fois théoriquement pour la paix mais en pratique contre le désarmement.

La LISAG est au faîte de sa gloire à la fin de 1933 avec 10.000 membres en Wallonie, la force des JGS y étant estimée à 25.000 à la même date. Ses membres sont parfois membres du POB (comme Paul-Henri Spaak qui y adhère de 1933 à 1935), parfois des sympathisants socialistes de gauche mais aussi des communistes oppositionnels (comme War Van Overstraeten qui est son porte-parole en 1935).

En 1934, le conflit qui oppose la Ligue au POB et aux JGS s’envenime à propos d’hebdomadaires qui se font concurrence et la loi interdisant les milices privées (et donc les défilés en uniforme) porte un coup fatal à la LISAG qui, à ce moment, avait étendu son combat à la lutte contre la guerre et le fascisme. En 1935, le POB interdit à ces électrons libres l’accès aux Maisons du Peuple. La LISAG disparaît de la scène politique en 1938 et, par la suite, l’itinéraire politique de ses membres est extrêmement varié. Si Paul-Henri Spaak finit comme secrétaire général de l’organisation militaire dirigée par les États-Unis, d’anciens membres de la LISAG se tourneront pendant l’occupation soit vers la collaboration, soit vers la Résistance, tandis que le parti socialiste en Flandre et le syndicat ABVV comprendront après la guerre beaucoup de bourgmestres, échevins ou leaders (comme Louis Major) ayant été membres dans leur jeunesse de la Ligue Internationale Socialiste Anti-Guerre.
Bien que se disant « internationale » cette Ligue n’aura connu réellement de sections qu’aux Pays-Bas et en Belgique, nouant aussi avec le POUM une éphémère collaboration pendant la guerre d’Espagne.

Le mérite de Gruud Bruijns est, sans conteste, d’avoir exhumé l’histoire de cette ligue, généralement ignorée dans la nébuleuse des pacifistes et autres résistants à la guerre. On peut cependant faire à l’auteur un certain nombre de remarques :
Il a voulu juxtaposer l’histoire de la Ligue aux Pays-Bas et en Belgique mais les contextes politiques et les forces socialistes sont si différentes que ce choix ne convainc pas.
L’auteur a choisi de citer dans le texte tous les auteurs consultés et d’y relever leurs lacunes. Cette succession de « Jan Hunin dit que », « Jan Creve pense », « Colignon affirme », « Raf van Lerberge s’est basé… » est indigeste et les détails parfois trop nombreux nuisent au récit.
Le plan, mélange de thématique et de chronologie, perd le lecteur dans des répétitions. Ainsi une citation de cinq lignes se retrouve à la fois à la page 96 et 103, les chiffres d’adhésion aux pages 103 et 108. On revient plusieurs fois sur l’Abyssinie, les rapports et la rupture avec le POB ou la concurrence avec les autres mouvements de jeunesse.
On regrettera aussi l’absence d’un index des noms cités (aujourd’hui si simple à composer), une bibliographie incomplète (où est l’ouvrage de Van Goethem cité page 23 ?) et désordonnée (Vandervelde, p. 288, vient après Vorrink), ainsi que la négligence dans les titres et citations en français (le défense, ligne au lieu de ligue, la guerre du Graal au lieu de la quête du Graal, etc.).
Mais on aura découvert un groupe antimilitariste tombé dans l’oubli et qui peut nous faire réfléchir sur les doubles discours actuels, eux aussi officiellement pour la paix, mais pratiquement opposés à toute réduction des dépenses militaires.

- Anne Morelli