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Dendooven, Dominiek, De vergeten soldaten van de Eerste Wereldoorlog (Berchem: Epo, 2019), 317 p.

Alain Colignon, CEGESOMA

En Flandre, les éditions Epo ont la réputation d’être proches d’une certaine mouvance progressiste passablement rougeoyante. Cette position leur a valu certaines inimitiés pointues de l’autre côté de l’échiquier politique. Néanmoins, elle leur a également permis d’élargir les champs de recherches vers des problématiques moins souvent abordées par d’autres producteurs culturels, mieux en cour ou ayant davantage pignon sur rue.

Fidèles à leurs traditions tout en délaissant quelque peu le genre polémique ou militant, elles ont pris l’initiative d’éditer une robuste recherche historienne tout en la mettant à la portée du public cultivé et intéressé : la thèse de doctorat défendue il y a peu avec succès par Dominiek Dendooven devant les instances académiques des universités du Kent et d’Anvers, sous le titre originel : Asia in Flanders Fields. A Transnational History of Indians and Chinese on the Western Front, 1914-1918.

Dans cette approche et cette thématique aux accents « post-coloniaux », l’auteur n’est assurément pas un inconnu. Brugeois d’origine, associé depuis 1998 à l’In Flanders Fields Museum d’Ypres, à la fois collaborateur au Département Histoire de l’Université d’Anvers et gastdocent à la KU Leuven KULAK, ce West-Flandrien avait déjà eu l’occasion de se faire connaître par différents travaux ayant trait au premier conflit mondial, tel qu’il a été vécu dans sa région. Et l’on songe notamment à Ieper als Heilige Grond (2001) ainsi qu’à Het oorlogslandschap van de Westhoek (2006) mais surtout à la belle exposition temporaire organisée en 2008 à Ypres et intitulée Mens-Cultuur-Oorlog. Multiculturele aspecten van de Eerste Wereldoorlog. Cette exposition a donné lieu à la plus connue de ses publications, Wereldoorlog Eén. Vijf continenten in Vlaanderen (Lannoo, 2008), bénéficiant d’une traduction en français (chez Racine). Le tout en labourant le terrain d’une future recherche doctorale. Il ne restait plus qu’à traduire celle-ci de l’anglais vers la langue de Vondel pour disposer d’une étude qui, pour être plus ciblée – ce n’est plus, cette fois, tous les peuples de la planète qui se retrouvent dans le Westhoek en 1914-1918 mais uniquement les soldats de l’Empire des Indes et les travailleurs auxiliaires recrutés en Chine – a pu conserver sa part d’originalité tout en se rendant accessible au lecteur profane avec l’élagage de son lourd appareil critique.

Pendant longtemps, une certaine historiographie de la Grande Guerre, plutôt cultivée dans les cercles intellectuels proches de l’extrême gauche pacifiste, a estimé que le rôle joué sur le front occidental par les forces armées coloniales avait été constamment sous-évalué, pour ne pas dire occulté. Chemin faisant, cette historiographie – qui avait au moins le mérite de contrebalancer des productions livresques empreintes de militarisme ou de nationalisme – n’hésitait pas à dénoncer le fait que les « troupes indigènes » recrutées dans les colonies avaient surtout servi de « chair à canon » dans des offensives suicides afin d’épargner le sang des Blancs, déjà passablement sollicité. Nonobstant son caractère polémique, ce type de littérature a eu le mérite de mettre en lumière certains faits peu connus et une certaine vulgate anticolonialiste, pétrie de bons sentiments mais peu férue d’exactitude ou de rigueur scientifiques, a fini par se répandre dans de vastes cercles de l’opinion publique. À la fin des années 1980, avec l’apparition et le développement des postcolonial studies, les éléments les plus engagés/conscientisés de ce courant ont renoué, consciemment ou non, avec cette vieille historiographie qui semblait avoir perdu sa raison d’être avec la grande vague des décolonisations. Disons-le d’emblée : fort heureusement, le travail de Dominiek Dendooven, par sa méthodologie et sa sérénité, échappe aux dérives qui peuvent menacer les productions les plus politiquement engagées de ces études.

En effet, derrière son intitulé un peu dramatisé ‘les soldats oubliés’ (De vergeten soldaten van de Eerste Wereldoorlog), cette étude se révèle une sobre approche de deux groupes humains bien spécifiques s’étant retrouvé, du fait de la guerre, dans les environs proches du « front de l’Yser ». Le titre de l’ouvrage ne le disant pas, il convient de préciser que si les uns – les Indiens – ont bel et bien été impliqués dans les combats, et parfois très tôt (mais pas tous), les autres – les Chinois – se sont contentés d’exercer des tâches de travailleurs auxiliaires, parfois loin de la ligne de feu. Dans le cas présent, Dendooven transcende quelque peu son cadre d’étude habituel pour déborder vers la France profonde ; quitte à braquer le feu des projecteurs sur la Flandre française, où se trouvaient, il est vrai, le gros des unités issues de l’Empire des Indes au service de Sa Gracieuse Majesté britannique. Cet apport humain n’était pas quelconque : l’Indian Expeditionary Corps (deux divisions d’infanterie, deux divisions de cavalerie) en arrivera à compter 90.000 hommes tandis que 48.000 autres Indiens d’origine tout aussi bigarrée (musulmans, hindous, Sikhs, Gurkhas, etc.) figureront comme force de travail auxiliaire dans l’Indian Labour Corps. Les soldats indiens, dont ceux de la fameuse Lahore Division, subiront de fortes pertes lors de la Deuxième Bataille d’Ypres (22 avril-25 mai 1915) et se verront même confrontés à la première attaque aux gaz de combat, toujours du côté d’Ypres. Est-il besoin de faire observer que ces gens, au regard des rares autochtones n’ayant pas évacué à l’approche ennemie et restés dans la région, semblaient tomber de la lune ? L’auteur se plaît d’ailleurs à rappeler qu’à l’époque la majorité des populations civiles, essentiellement rurales, recouraient bien plus volontiers au dialecte local qu’à l’ Algemeen Beschaafd Nederlands…qui de toute façon n’aurait pas davantage été compris. Que dire alors des Chinois d’abord recrutés, début 1916, par la France puis, à l’automne de la même année, par la Grande-Bretagne ? La république de Chine étant alors neutre – elle n’entrera dans le conflit aux côtés des Alliés qu’en août 1917 –, il était hors de question, pour les alliés occidentaux, de lever des corps de volontaires chinois armés. Les Franco-Britanniques avaient alors besoin d’ouvriers à l’arrière du front, pour les travaux d’infrastructure, ou dans les usines d’armement. Au bout du compte, quelque 140.000 Chinois ont accepté, de 1917 à 1919, de remplir cet office, les uns (96.000) au service des Britanniques, les autres (40.000) sous les ordres de la République française. En Flandre belge, la région de Poperinge semble avoir été leur point de chute ordinaire durant le conflit. L’Armistice survenu, ils se répandirent à travers la Flandre-Occidentale afin de « nettoyer » le front de l’Yser de ses cadavres, de ses barbelés et des obus non explosés, ce qui n’alla pas sans soulever des frictions, nées de l’incompréhension, avec les autochtones.

Car c’est ce qui apparaît dans l’ouvrage en question : la difficulté de communiquer entre ces différents groupes humains ballottés par la guerre. Certes, les nécessités de la vie sociale, même réduite au minimum, ont fini par engendrer quelques liens, quelques contacts, fut-ce dans les cabarets et les auberges improvisées à l’arrière du front. Contacts pas toujours exempts de paternalisme ou de pointes de racisme à l’encontre des coolies chinois, davantage que les soldats indiens en relations avec les populations civiles et ce, surtout après l’Armistice, alors que les « évacués » revenaient massivement au pays. Dendooven a le mérite de ne rien cacher de ces frictions, en se fondant très largement sur le diaire encore inédit à ce jour du pastoor Achiel Van Walleghem, curé de Dikkebus. Et de souligner que si la guerre totale a bien confronté tous ces groupes humains à une forme de « mondialisation », celle-ci s’est révélée éphémère, chacun rentrant chez soi après un laps de temps plus ou moins bref, plus ou moins long avec son bagage de souvenirs, de mécomptes, d’expériences positives aussi.

Ce n’est que très récemment que les autorités flamandes locales ont élevé des monuments commémoratifs à la mémoire qui des Indiens (2002), qui des Chinois (2017) échoués un temps, par les hasards de la guerre, sous nos cieux. Hommage tardif…ou témoignage indirect d’une autre mondialisation, économique celle-là, qui

- Alain Colignon